Comme tous les quinze ans, le canal Saint Martin, cet endroit si poétique de Paris, va être vidé afin de le nettoyer et de l’entretenir.
Au cours des quinze dernières années de nombreux objets ont été jetés dans le canal et sont allés s’enfoncer dans la vase où ils servirent de refuge à la faune abondante qui prospère là … nous donnant une idée de la survie animale dans un univers profondément pollué.
Les hommes vivent, eux aussi, dans une telle pollution, physique comme intellectuelle, que l’on peut faire l’hypothèse que la vie triomphe toujours … mais il ne faudrait peut-être pas pousser ce raisonnement trop loin.
Si l’on en juge par l’inventaire résultant des vidages précédents, comme les ratons-laveurs de Jacques PREVERT, les nettoyeurs devraient remonter sur les quais de « l’hôtel du nord » des objets fort insolites et surtout un grand nombre de bouteilles … vides.
C’est une tranche de quinze années de notre vie qui nous sera restituée là et les sociologues pourraient y puiser, c’est le cas de le dire, une intéressante vision de l’évolution de nos mœurs.
Il me semble que nous n’avons pas beaucoup évolué dans un sens plus fraternel … et je pense que l’on n’y trouvera donc pas la moitié de la cape de centurion de Saint MARTIN.
Quelle belle découverte ça serait, cependant, si l’on sortait cette cape de la vase et qu’on en fasse une oriflamme symbolisant une société fondée sur le partage et non sur le gaspillage et le jetable.
A celui qui, le regard brillant, sortirait cela de la vase où nous pataugeons, nous pourrions tous dire en chœur : « T’as de beaux yeux, tu sais ! ».
Jean-Paul BOURGЀS 6 janvier 2016