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« intelligence supérieure » ?


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A pro­pos d’un cer­tain nombre de res­pon­sables poli­tiques, on lit dans les papiers qui leur sont consa­crés … « qu’il est d’une intel­li­gence supérieure … ».

Cette for­mule jour­na­lis­tique n’aurait guère d’importance, si elle n’était pas d’une part très fré­quente et sur­tout assez éton­nante compte-tenu des sot­tises sou­vent com­mises par ces indi­vi­dus « supérieurs ».

L’usage le plus récent, c’est dans le texte de Fabrice ARFI à pro­pos de Jérôme CAHUZAC qu’on le trouve, dans une cita­tion extraite du livre de Jean-Luc BARRÉ.

D’habitude je glisse à autre-chose sans y prê­ter trop d’attention, mais cette fois j’ai eu envie de réflé­chir un petit moment à cette étrange formule.

Etrange for­mule, en effet, quand elle s’applique à un homme dont les mérites intel­lec­tuels anté­rieurs ne l’avaient conduit qu’à repi­quer des che­veux sur des crânes dégar­nis (Ce qui est à la por­tée d’intelligences cou­rantes), et qui, ron­gé d’ambition, n’avait pas ima­gi­né et com­pris que cer­tains délits fis­caux ont de bonnes chances de ne pas res­ter éter­nel­le­ment cachés.

Mais alors qu’appelle-t-on « intel­li­gence supé­rieure » chez un homme poli­tique ? Ne serait-ce pas ce que, chez d’autres, on appel­le­rait un culot et une arro­gance hors du commun ?

On sait bien que, pour réus­sir en poli­tique, il ne faut pas être supé­rieur aux autres, il faut juste ame­ner les gens à le croire, puis à le pro­pa­ger … jusqu’à ce que cela prenne le sta­tut de « véri­té révélée ».

Hélas, nom­breux sont les hommes poli­tiques, répu­tés beau­coup plus intel­li­gents que la moyenne, qui nous admi­nistrent sur­tout leurs insuf­fi­sances intel­lec­tuelles. Lais­sons Jérôme CAHUZAC trou­ver, grâce à son « intel­li­gence supé­rieure », des fables un peu moins tirées par les che­veux pour expli­quer l’origine, le lieu de conser­va­tion et la des­ti­na­tion de ce qui appa­raît comme le fruit pour­ri d’un indi­vi­du corrompu.

L’important ce serait de ces­ser d’excuser des com­por­te­ments scan­da­leux sur une appar­te­nance d’individus à une caste mythique fon­dée sur une « intel­li­gence supé­rieure » ni mesu­rée, ni démontrée.

Naguère être de sang-bleu fai­sait échap­per à la loi com­mune. Désor­mais l’argent tient lieu de bre­vet de supé­rio­ri­té. Et nombre de poli­tiques sont, ain­si, déco­rés de ce grand cor­don de l’intelligentitude qui les sort de la boue com­mune. Alors que l’on pour­rait s’attendre à ce que cela leur impose plus de morale publique … c’est, au contraire, un billet d’excuse qui leur est remis.

Serions-nous, col­lec­ti­ve­ment, deman­deurs de la créa­tion d’une caste supé­rieure auto-proclamée ?
J’en ai sou­vent l’impression … mais ai-je assez d’intelligence pour en parler ?

Jean-Paul BOURGЀS 22 jan­vier 2015

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19 réponses “« intelligence supérieure » ?”

  1. Al Ceste
    22 janvier 2016 à 14 h 02 min

    Mais alors qu’appelle-t-on « intel­li­gence supé­rieure » chez un homme politique ?

    Si on sait que cette expres­sion est employée par des jour­na­listes dont la fonc­tion natu­relle est de cirer les pompes minis­té­rielles, la réponse est inutile ! Arfi, qui n’est pas dans les plus ser­viles de jour­na­listes, n’a fait qu’u­ti­li­ser un tic d’é­cri­ture propre au métier.

    Autre tic jour­na­lis­tique : l’ob­sé­quieux “n’a pas sou­hai­té répondre” alors que “a refu­sé de répondre” serait plus juste ou, à défaut le fac­tuel “n’a pas répon­du”. Car, obser­vez bien, c’est tou­jours un VIP qui dit ça de sa hau­teur, jamais Moha­med, Baba­car ou Dédé de Montmartre.

    • 22 janvier 2016 à 23 h 04 min

      Oh ! je ne veux nul­le­ment cri­ti­quer par­ti­cu­liè­re­ment Fabrice ARFI qui n’est pas le plus apla­ti devant les poli­tiques. Mais, jus­te­ment, que même sous sa plume, ces pon­cifs soient véhi­cu­lés me semble mon­trer que l’i­dée d’une caste supé­rieure est ins­tal­lée dans les esprits. Et, de caste supé­rieure à l’exemp­tion de res­pect des règles du vul­gum pecus, il n’y a qu’un pas que beau­coup franchissent.

  2. 22 janvier 2016 à 14 h 57 min

    Je crois que ce qu’on appelle “intel­li­gence” est notre facul­té à trou­ver les moyens de réa­li­ser nos dési­rs. Un dési­rant modeste trou­ve­ra des moyens dans les clous de la léga­li­té. Un dési­rant moins modeste trou­ve­ra des moyens qui pour­ront se trou­ver hors de ces clous. Un dési­rant extrême fera voter des lois qui le met­tront à l’a­bri. Je résume ain­si : le modeste, l’ar­ro­gant et le prince.

    Le désir du roi fait la loi.

    • 23 janvier 2016 à 0 h 37 min

      C’est une vision, mais quand le puis­sant se prend pour le roi et s’i­ma­gine plier les lois à son désir … ne rede­vient-il pas un imbé­cile … car ça ne marche jamais très longtemps ?

  3. 22 janvier 2016 à 19 h 05 min

    le modeste, l’arrogant et le prince”.

    Très jolie clas­si­fi­ca­tion syn­thé­tique, Lar­bi… Je la com­plexi­fie­rais bien un tan­ti­net, si vous accep­tiez : d’a­bord il existe aus­si des gens qui trans­gressent, mais sans aucune arro­gance, par pru­dence jus­te­ment (“Caute”, recom­man­dait Spinoza).

    Ensuite, quant à l’in­tel­li­gence de Mon­sieur Cahu­zac, nous sommes d’ac­cord Jean-Paul, le type était sur­tout très niais. Il lui aurait suf­fi de prendre deux heures avant sa nomi­na­tion comme Ministre pour faire rapa­trier ses comptes en France, moyen­nant une légère taxa­tion. Mais il s’est ima­gi­né intou­chable, et n’a même pas dai­gné “s’a­bais­ser” à des pré­cau­tions de bon sens…

    Plus dure a été la chute 🙂

    Donc au total “le modeste, le mar­gi­nal séquent, l’arrogant effi­cace, l’ar­ro­gant se croyant tout puis­sant, et le prince” ?

    Ami­ca­le­ment.

  4. 22 janvier 2016 à 23 h 07 min

    L’in­tel­li­gence supé­rieure est un concept pour le moins étrange quand on parle de pou­voir. Il fau­drait encore spé­ci­fier en quoi elle est supé­rieure : l’est-elle stra­té­gi­que­ment ? L’est-elle de pure mani­pu­la­tion d’un groupe, de masses ? Il s’a­git bien de formes supé­rieures d’in­tel­li­gence, mais elles sont limi­tées à un domaine pré­cis. Pics de com­pé­tence, en somme. C’est un peu la clas­si­fi­ca­tion de Pas­cal sur le semi-habile, l’ha­bile, etc… et cela n’a, je crois, rien à voir avec la morale. On peut être très moral est par­fai­te­ment stu­pide, ou très intel­li­gent et par­fai­te­ment inadap­té aux condi­tions de vie en socié­té. C’est aus­si une ques­tion de désir, comme le rap­pe­lait Lar­bi. Le désir du pou­voir est un moteur puis­sant, comme le désir de pos­sé­der. D’une façon ou d’une autre, à un plus ou moins haut degré, ils finissent géné­ra­le­ment par abou­tir… à quelque chose. Doit-on pour autant consi­dé­rer que ceux pour qui il n’a­bou­tit pas sont stu­pides ? Ou bien plus sim­ple­ment qu’ils n’en ont pas le désir ?

    • 23 janvier 2016 à 0 h 44 min

      Je pense, moi aus­si, que le pou­voir n’est qu’une affaire de dési­rs … où le désir le plus fort l’emporte. Mais cela n’in­duit rien quant à l’in­tel­li­gence et les médias nous bas­sinent donc en nous ven­dant et van­tant ces “intel­li­gence supé­rieures” de types extrê­me­ment ordinaires.

  5. 22 janvier 2016 à 23 h 14 min

    On n’est supé­rieur que si l’autre accepte (ou est contraint) d’être infé­rieur, ou d’en jouer le rôle, comme les courtisans.

  6. 23 janvier 2016 à 19 h 10 min

    J’ai oublié de citer mon dada : les deux intel­li­gences, la céré­brale et la sen­sible. Ouf ! ça va mieux !

    Je pense que les psy­cho­pathes avides d’argent ou de pou­voir (et pour­quoi pas les deux) ont un défi­cit de la sen­sible. Ce manque ne leur per­met pas d’a­voir des remords pour les consé­quences de leur désir sur les autres.

    J’ai remar­qué que leur amour-propre est à éclipses : ils le ravalent lorsque celui-ci est un obs­tacle à la réa­li­sa­tion de ce que à quoi ils tiennent. Mais devant un “infé­rieur”, ils le dégainent à la Lucky Luke. Quels imbé­ciles ! Il faut voir leur sou­rire bien imi­té après déglu­ti­tion d’une cou­leuvre de belle taille. Et c’est pour eux qu’on vote.

    • 24 janvier 2016 à 2 h 33 min

      C’est un dada qu’à pré­sent les sciences cog­ni­tives approuvent et même plé­bis­citent : on ne fait plus de test de QI, sans faire aus­si un test de QE, aux der­nières nou­velles d’un cer­tain prof de psy­cho sociale de ma connais­sance. Donc, et si tant est que ces “tests” qui me font un peu sou­rire quand même aient une quel­conque valeur (ce dont je suis loin d’être convain­cue) vous avez rai­son. Un défi­cit d’empathie ne conduit pas un être humain, fût-il doué de capa­ci­tés intel­lec­tuelles ‑pour sché­ma­ti­ser-remar­quables en d’autres domaines, à être ce qu’il est d’a­bord, humain. Et c’est fort dom­ma­geable, pour lui et sur­tout pour les autres, même s’il pos­sède une rolex à 40 ans. 🙂

      • 24 janvier 2016 à 9 h 33 min

        J’ai eu une Rolex à 25 ans. Je dois dire, à ma décharge, que je l’a­vais volée.

        • 24 janvier 2016 à 11 h 49 min

          Pour Chris­tine ;: la Rolex n’est requise qu’à par­tir de 50 ans ! Jusque-là son absence est tolérée.

          Pour Lar­bi : volée, reçue en cadeau ou vul­gai­re­ment ache­tée, la pos­ses­sion d’une Rolex dès l’âge de 25 ans te classe d’emblée par­mi les indi­vi­dus deux fois plus brillants que ceux qui portent habi­tuel­le­ment une Rolex. Je t’ai, depuis long­temps, clas­sé par­mi les types d’ex­cep­tion … je n’a­vais pas iden­ti­fié que cela décou­lait de cette Rolex.

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