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Indiscipline répond à Bruno Latour le trop discipliné


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Par Igor Babou et Joëlle Le Marec.

Bru­no Latour, socio­logue des sciences, vient de publier un article d’opinion dans Le Monde sous le titre : « Auto­no­mie, que de crimes on com­met en ton nom ! » (Le Monde, 25.02.09. Lire l’article en ligne).

Enfon­çant les pon­cifs jour­na­lis­tiques, l’article de Bru­no Latour com­mence par une phrase choc accu­sant les intel­lec­tuels (tous les intel­lec­tuels) de gauche (selon le pon­cif, un intel­lec­tuel est for­cé­ment de gauche) d’immobilisme : tel des « chauf­feurs de taxi », les uni­ver­si­taires seraient ins­tal­lés « dans la défense obs­ti­née du sta­tu quo ». Mer­ci de la com­pa­rai­son avec les chauf­feurs de taxi : on ne sait pas trop, cepen­dant, qui cette plate ana­lo­gie est char­gée d’insulter, et pour le moment, le syn­di­cat des chauf­feurs de taxi n’a pas réagi. Dans la fou­lée du dis­cours mépri­sant de Nico­las Sar­ko­zy le 22 jan­vier 2009, Bru­no Latour natu­ra­lise sans honte, outre le registre de l’insulte et de la stig­ma­ti­sa­tion qui fait le lit de l’anti-intellectualisme ambiant, ce qu’il ne peut pas ne pas savoir être un men­songe : contrai­re­ment aux accu­sa­tions d’immobilisme, il y a un rythme inten­sif des chan­ge­ments dans l’enseignement supé­rieur et la recherche. Ces chan­ge­ments ont pu être liés aux ini­tia­tives du milieu uni­ver­si­taire lui-même. Mais cette dyna­mique des chan­ge­ments internes est désor­mais para­ly­sée par le rythme fré­né­tique des muta­tions impo­sées pat l’État, et elles seront évi­dem­ment entra­vées par la logique tatillonne, ges­tion­naire, mana­gé­riale de la loi sur l’Autonomie des Universités.

Réaf­fir­mons-le avec force : l’université n’a en aucun cas été un lieu d’immobilisme durant les der­nières décen­nies. Elle a for­mé des cen­taines de mil­liers d’étudiants, a déve­lop­pé d’innombrables filières, a créé feu les IUP (Ins­ti­tuts Uni­ver­si­taires Pro­fes­sion­na­li­sés), qui ont été des suc­cès remar­quables avant de se voir sup­pri­més par des réformes impo­sées sans aucune connais­sance de ce qui se fai­sait loca­le­ment à l’initiative des dyna­miques propres de chaque université.

Ce sont éga­le­ment des éta­blis­se­ments d’en­sei­gne­ment supé­rieur et de recherche qui ont eu l’i­ni­tia­tive des double cur­sus « Sciences et sciences poli­tiques » dans les­quels Bru­no Latour enseigne aujourd’­hui. Il est sur­pre­nant qu’il ne compte pour rien ce dont il a pu béné­fi­cier et faire béné­fi­cier à d’autres, col­lègues et étu­diants, dans la vision cari­ca­tu­rale de cette uni­ver­si­té immo­bi­liste qu’il évoque.

En outre, ceux qui s’opposent actuel­le­ment à la réforme ne sont évi­dem­ment pas tous des « gau­chistes » : l’Académie des sciences, l’Institut Uni­ver­si­taire de France, le Conseil Natio­nal des Uni­ver­si­tés, les Pré­si­dents d’université, les socié­tés savantes, un grand nombre de labo­ra­toires ont rejoint le mou­ve­ment. Bru­no Latour est bien seul à pen­ser que tous ces col­lègues en colère ne seraient « que » des gau­chistes (de toute manière, cet usage inju­rieux du terme « gau­chiste » n’est pas digne de quelqu’un qui pré­tend par ailleurs refon­der le poli­tique sur des bases écologiques).

La mau­vaise foi n’est pas sur­pre­nante de la part de Bru­no Latour. Sa ten­dance à cari­ca­tu­rer des posi­tions fic­tives au lieu d’affronter les argu­ments réels était mani­feste lors de la dis­cus­sion de ques­tions comme la rela­tion des socié­tés à la nature, à la moder­ni­té ou aux sciences ((Voir à ce pro­pos l’excellent – et vif – échange entre Alain Caillé et Bru­no Latour dans la revue du MAUSS : Revue du MAUSS n° 17 — « Chas­sez le natu­rel… éco­lo­gisme, natu­ra­lisme et construc­ti­visme », 1er semestre 2001.)).

Dans le second para­graphe de l’article du Monde, cette mau­vaise foi prend une dimen­sion déme­su­rée : au nom de ses tra­vaux, ayant mon­tré l’étroite imbri­ca­tion entre les savoirs et les pra­tiques sociales – tra­vaux aux­quels nous adhé­rons -, Bru­no Latour pré­tend que la remise en cause de la loi sur l’autonomie des uni­ver­si­tés serait contra­dic­toire : la science n’ayant jamais été « auto­nome » (au sens de sépa­rée des pra­tiques et des enjeux sociaux), ce serait un non sens que de lut­ter contre une réforme lui appor­tant une auto­no­mie qu’elle n’aurait jamais eue. Pas­sons sur le carac­tère équi­voque du rai­son­ne­ment, mais on ne peut que s’étonner de l’analogie entre l’usage du mot « auto­no­mie » quand il est mobi­li­sé pour ana­ly­ser le grand par­tage entre Science et Socié­té (en effet, on peut accep­ter l’idée qu’il n’y ait pas « auto­no­mie » des sciences) et l’usage du terme « auto­no­mie » dans les dis­cours minis­té­riels et gou­ver­ne­men­taux sur l’université : il s’agit dans ce cas d’un mode d’organisation délé­gant un cer­tain nombre de pou­voirs autre­fois assu­més col­lé­gia­le­ment au pré­sident de l’université, trans­for­mé en mana­ger diri­geant son éta­blis­se­ment comme un patron. Bru­no Latour ne peut pas ne pas être au cou­rant de cette dis­tinc­tion, et c’est donc en connais­sance de cause qu’il confond un niveau des­crip­tif et concep­tuel de rai­son­ne­ment avec celui, pra­tique et nor­ma­tif, de la déma­go­gie gou­ver­ne­men­tale. Mais, fait signi­fi­ca­tif, c’est dans la presse « de qua­li­té » du Monde qu’il s’exprime, cer­tain qu’il est de ne pas être repris par des relec­teurs qui lui auraient deman­dé de revoir sa copie au nom d’un refus d’analogies infon­dées s’il s’était expri­mé dans une revue scientifique.

En revanche, le rai­son­ne­ment latou­rien s’inverse lors de l’évocation du métier d’enseignant-chercheur. Bru­no Latour y voit lui-même un de ces Grands Par­tages qu’il dénonce pour­tant si sou­vent : le métier d’enseignant et le métier de cher­cheurs seraient dis­tincts. Cet énon­cé est sidé­rant sous la plume d’un pro­fes­seur des uni­ver­si­tés. Notre actuel sta­tut d’enseignants-chercheurs, celui-là même qui figure sur la fiche de paye de Bru­no Latour en tant que pro­fes­seur des uni­ver­si­tés, comme la pra­tique des cher­cheurs à plein temps du CNRS qui sont très nom­breux à ensei­gner, indiquent suf­fi­sam­ment que les deux métiers ne sont pas dis­so­ciés. L’idée que l’enseignement serait une sorte de puni­tion pour ceux qui ne sont pas des cher­cheurs assez per­for­mants est un impli­cite de sens com­mun, une naï­ve­té éton­nante des membres du cabi­net Pécresse, tout à fait révé­la­teur de leur mécon­nais­sance du milieu, et qui a cho­qué pro­fon­dé­ment la com­mu­nau­té uni­ver­si­taire. Bru­no Latour ne peut pas l’ignorer. A moins qu’il ne nous révèle là sa vision toute per­son­nelle des liens entre l’enseignement et la recherche…

Pré­tendre que cette sépa­ra­tion des fonc­tions pour­rait favo­ri­ser le lien entre les ensei­gnants et leur public d’étudiants, relève là aus­si de la pure mau­vaise foi.

Mais le moment le plus déso­lant arrive à la phrase sui­vante, d’une vio­lence et d’un mépris confon­dants : « Les uni­ver­si­taires ont tel­le­ment per­du le goût de la liber­té qu’ils se sont mis à confondre la dépen­dance à l’É­tat avec la garan­tie de l’ex­cel­lence ». Bru­no Latour sait qu’en réa­li­té c’est au nom des liber­tés aca­dé­miques mena­cées par une réforme visant à concen­trer les pou­voirs entre les mains des pré­si­dents d’universités et des direc­teurs de grandes écoles au détri­ment des ins­tances col­lé­giales, que l’actuel mou­ve­ment de remise en cause des réformes est né. Il ne peut pas igno­rer non plus que la lutte contre les réformes vise à des­ser­rer les liens struc­tu­rels entre les champs poli­tique et éco­no­mique d’une part et le champ de la pro­duc­tion des connais­sances d’autre part, et qu’elle est donc une lutte pour une auto­no­mie intel­lec­tuelle face à une bureau­cra­tie et un pou­voir auto­ri­taire chaque jour plus étouf­fants. Com­ment confondre aus­si gros­siè­re­ment la dépen­dance à l’État qui va se ren­for­cer avec les réformes, et le fonc­tion­ne­ment col­lé­gial des sciences tel qu’il a été his­to­ri­que­ment ins­ti­tué ? Cette col­lé­gia­li­té mena­cée par les réformes est une garan­tie d’autonomie intel­lec­tuelle vis-à-vis des pou­voirs même si elle est fra­gile et si cha­cun d’entre nous en connaît bien les limites : auto­no­mie non pas de la science vis-à-vis de la socié­té — mer­ci de ne pas nous faire l’injure de pen­ser que nous ne vous avons pas bien lu ou que nous n’avons pas nous-mêmes mené assez de tra­vaux de recherche sur les sciences pour ne pas en être déjà ample­ment convain­cus — mais auto­no­mie à l’égard de tutelles poli­tiques et du modèle idéo­lo­gique de la concurrence.

Le simple constat de la bru­ta­li­té et de la vul­ga­ri­té de l’expression pré­si­den­tielle à l’égard des uni­ver­si­taires et de la recherche, ou encore la lec­ture atten­tive des nom­breux textes issus des coor­di­na­tions ou des divers col­lec­tifs infor­mels consti­tués depuis l’entrée en vigueur des accords de Bologne et de l’application de l’AGCS (accord géné­ral sur le com­merce et les ser­vices) au sec­teur de l’enseignement supé­rieur, auraient du suf­fire à évi­ter à Bru­no Latour d’écrire autant de bêtises !

Mais il a pré­fé­ré, comme sou­vent, jouer sur les mots et mettre en scène une fausse rup­ture avec des posi­tions qu’il invente. Pierre Bour­dieu, ana­ly­sant ses tra­vaux, avait déjà ana­ly­sé ces glis­se­ments de sens et ces ana­lo­gies outrancières :

[…] on peut, en jouant sur les mots ou en lais­sant jouer les mots, pas­ser à des pro­po­si­tions d’allure radi­cales (propres à faire de grands effets, sur­tout sur des cam­pus d’Outre-Atlantique domi­nés par la vision logi­ciste-posi­ti­viste). En disant que les faits sont arti­fi­ciels au sens de fabri­qués, Latour et Wool­gar laissent entendre qu’ils sont fic­tifs, pas objec­tifs, pas authen­tiques. Le suc­cès de leurs pro­pos résulte de « l’effet de radi­ca­li­té », comme le dit Yves Gin­gras (2000), qui naît de ce glis­se­ment sug­gé­ré et encou­ra­gé par un habile usage de concepts amphi­bo­lo­giques. La stra­té­gie de pas­sage à la limite est un des res­sorts pri­vi­lé­giés de la recherche de cet effet (je pense à l’usage qui, dans les années 1970, a été fait de la thèse illit­chienne de l’abolition de l’école pour com­battre la des­crip­tion de l’effet repro­duc­teur de l’école) ; mais elle peut conduire à des posi­tions inte­nables, insou­te­nables, parce que tout sim­ple­ment absurdes. ((Bour­dieu, Pierre. Science de la science et réflexi­vi­té. Paris : Rai­sons d’Agir, 2001, p. 56.))

Ce qui est ici insou­te­nable, outre l’usage d’analogies et le jeu sur le sens du mot « auto­no­mie », c’est de voir un cher­cheur de renom­mée inter­na­tio­nale s’appuyer sur son accès direct à une presse qui n’a eu de cesse de cen­su­rer la parole et les argu­ments des uni­ver­si­taires en lutte, pour s’exprimer, au nom d’une légi­ti­mi­té aca­dé­mique, contre un fonc­tion­ne­ment aca­dé­mique qu’il cari­ca­ture au lieu de le décrire hon­nê­te­ment, tout en ne tenant aucun compte des vrais argu­ments des oppo­sants à la réforme qui, eux n’ont que peu de chance d’accéder aux pages du Monde : ou com­ment faus­ser le débat public en ne tenant aucun compte de sa propre posi­tion dans le champ média­tique et dans le mar­ché aux idées de sens commun.

Mais tout cela ne serait pas grand chose, fina­le­ment, en regard de l’avant der­nier para­graphe de l’article : « Les mau­vaises uni­ver­si­tés dis­pa­raî­tront enfin, libé­rant des res­sources pour les autres : ce n’est pas à la gauche de défendre les pri­vi­lèges de la noblesse d’É­tat. ». Alors que Bru­no Latour a pas­sé des années à nous assu­rer du carac­tère com­plexe, « touf­fu », « éche­ve­lé » des média­tions construi­sant la rela­tion « non moderne » entre les sciences et la socié­té, alors qu’il a pas­sé des années à nous mettre en garde contre les dicho­to­mies et les grands par­tages abu­sifs consti­tu­tifs de la « moder­ni­té », voi­là qu’il en revient à une concep­tion essen­tia­liste des ins­ti­tu­tions comme s’opposant, sui gene­ri, sur l’axe du bon et du mau­vais ! Il y aurait fina­le­ment des « bonnes » uni­ver­si­tés (sans doute les grandes écoles ou les uni­ver­si­tés bien dotées du centre de Paris) et les « mau­vaises » : on ima­gine sans peine que les exclues du tableau d’honneur latou­rien seront les petites uni­ver­si­tés de pro­vince, ou celles n’ayant pas de double cur­sus avec Science Po Paris…

Nul doute que ce retour à une socio­lo­gie de comp­toir appuyée sur des caté­go­ries dicho­to­miques de sens com­mun (bon vs mau­vais), insen­sible à la dyna­mique des ins­ti­tu­tions, à l’évolution com­plexe des recru­te­ments, des tra­vaux empi­riques, de la pro­gram­ma­tion de la recherche, des sou­tiens finan­ciers, de l’impact des réformes, de la gou­ver­nance des éta­blis­se­ments, ou encore aux enjeux démo­cra­tiques du savoir, sera propre à appa­raître comme une posi­tion radi­cale et anti­con­for­miste à Science po ou à l’ENA où la rhé­to­rique jour­na­lis­tique et les rac­cour­cis de sens com­mun font figure d’argumentation : en l’absence de tra­vail sur les faits et sur les dis­cours, le fai­ti­chisme des opi­nions et du jeu sur le sens des mots peut se déployer et prendre l’allure d’une lutte har­die contre les cor­po­ra­tismes, d’une sainte colère contre l’immobilisme académique.

Une der­nière chose, mais non des moindres : lors de la remise des pre­miers diplômes des double cur­sus « sciences et sciences poli­tiques », et l’inauguration des nou­veaux doubles cur­sus « sciences et his­toire », dans l’amphithéâtre de la Sor­bonne, les pré­si­dents des uni­ver­si­tés de Paris IV, Paris VI, et le direc­teur de l’IEP de Paris fai­saient face à des cen­taines d’étudiants lau­réats ou nou­vel­le­ment ins­crits dans ces nou­velles filières issues non des réformes, mais de l’initiative des uni­ver­si­taires eux-mêmes. C’était un moment impor­tant, et Georges Moli­nié, pré­sident de l’Université Paris IV, a su s’adresser aux étu­diants pour évo­quer ce que signi­fiait dans le contexte actuel l’apparition de for­ma­tions com­bi­nant les sciences de la nature et les sciences humaines et sociales. Il a su évo­quer l’unité du pro­jet aca­dé­mique, de son uto­pie jamais atteinte, mais tou­jours ins­pi­ra­trice. C’est l’explorateur Jean-Louis Etienne qui, éton­nam­ment, a ten­té assez mal­adroi­te­ment, mais avec beau­coup de cha­leur, de tenir un dis­cours sur les enjeux de ces for­ma­tions pion­nières, très exi­geantes. Et Bru­no Latour ? Assis sur le pre­mier rang des gra­dins, il était plon­gé dans la lec­ture de son cour­rier, déli­bé­ré­ment absent et indif­fé­rent, ne se réveillant que pour remettre les nou­veaux diplômes et ser­rer des mains. Pas un mot de celui qui a tant écrit sur la poli­tique de la nature, ou sur ce que la socio­lo­gie fait aux sciences.

A côté de l’un d’entre nous, sur les gra­dins, deux étu­diants venus à la ren­contre du monde uni­ver­si­taire tentent comme ils peuvent de recons­ti­tuer l’évènement qui n’aura pas lieu en surin­ves­tis­sant les quelques paroles de Georges Moli­nié, les seules qui aient été à la hau­teur de leur attente. Et Bru­no Latour ? Il n’a rien à leur dire. Il se réserve pour d’autres tri­bunes, plus ren­tables édi­to­ria­le­ment. Un cénacle d’intellectuels pon­ti­fiant à Venise ((Latour, Bru­no. Les atmo­sphères de la poli­tique : Dia­logue pour un monde com­mun. Paris : Empê­cheurs de Pen­ser en Rond, 2006.)), un article dans le jour­nal « Le Monde ».

Igor Babou
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7 réponses “Indiscipline répond à Bruno Latour le trop discipliné”

  1. Laura
    28 février 2009 à 19 h 10 min

    Juste une petite cor­rec­tion: vous appe­lez Moli­nié Pierre dans la pre­mière occurrence.
    C’est triste ce que vous poin­tez là chez BL. Une vieille nos­tal­gie pro-sys­tème amé­ri­cain ? Je suis assez d’ac­cord pour dire que l’u­ni­ver­si­té a bien du mal à fonc­tion­ner en tant que telle, et il faut la réfor­mer, et non la défendre comme elle est, mais là, ce qu’on nous pro­pose, c’est aber­rant, et qu’un cher­cheur comme BL nie les évo­lu­tions et les efforts est peu soli­daire voire méprisant.

  2. melchior
    2 mars 2009 à 13 h 06 min

    Sans entrer dans les détails de l’oeuvre de B. Latour, pré­sen­tée ici de façon un peu cari­ca­tu­rale à mon sens, on peut tou­te­fois faire une remarque de bon sens à la tri­bune de Latour publiée dans le monde : elle mani­feste un cruel manque de connais­sances de la réa­li­té dont il parle. N’ayant jamais fait de recherche sur l’u­ni­ver­si­té fran­çaise actuelle, notre brillant auteur s’est limi­té au registre des cli­chés écu­lés, repre­nant (sans s’en rendre compte ?) les rhé­to­riques creuses de Pécresse & cie qui ne connaissent pas davan­tage le fonc­tion­ne­ment de l’U­ni­ver­si­té et se réels pro­blèmes, maté­riels, orga­ni­sa­tion­nels, qui ne se résolvent pas avec un “yaka” et “faites-nous confiance, on veut votre bien, mais vous ne vous vous en ren­dez pas compte, car vous êtes mal éclai­rés”, aus­si indignes de la part d’une ministre que d’un savant qui se réclame de Dewey. L’ex­pli­ca­tion, hélas, est simple. Comme Pécresse, pro­duit d’HEC et de l’E­NA, Latour n’a jamais tra­vaillé dans l’u­ni­ver­si­té fran­çaise. Ensei­gnant en Cali­for­nie, puis à l’e­cole des Mines, puis à la Lon­don school of eco­no­mics, puis à L’IEP de Paris, notre spé­cia­liste n’a jamais été membre d’une uni­ver­si­té fran­çaise. Bien sûr, cela n’a rien d’in­fa­mant, mais c’est un peu gênant quand on pré­tend appor­ter la bonne nou­velle éclai­rée aux par­ties pre­nantes de la crise actuelle, notam­ment aux uni­ver­si­taires enté­né­brés dans leur cor­po­ra­tisme. Que Latour étu­die la ques­tion avec la patience du cher­cheur et qu’il revienne avec la modes­tie poli­tique néces­saire. Plus lar­ge­ment, on peut ajou­ter un mot à ce débat.
    Com­ment, dans ce domaine, le gou­ver­ne­ment envi­sage-t-il de “réfor­mer” l’u­ni­ver­si­té sans écou­ter l’ex­per­tise des pre­miers infor­més, et même en les pre­nant osten­si­ble­ment pour des billes ? Peut-on ces­ser de consi­dé­rer que leur recom­man­da­tions sont mues avant tout par un égoïsme mal­sain, alors que les ministres de la science infuse seraient, par le Saint-esprit reçu de la Grande Ecole, capables d’ap­por­ter la Solu­tion Ultime, en un tournemain ?

    • Avatar photo 2 mars 2009 à 20 h 24 min

      Nous n’a­vons pas cher­ché à pré­sen­ter l’oeuvre de Bru­no Latour, mais sim­ple­ment à réagir à son texte. Son oeuvre nous paraît suf­fi­sam­ment connue pour ne pas avoir à la com­men­ter dans les limites de notre com­men­taire. Je pense que le pro­blème réel dont l’ar­ticle témoigne n’est pas une mécon­nais­sance de l’U­ni­ver­si­té. Il serait plu­tôt, et c’est plus inquié­tant, dans le fait que ce soit Bru­no Latour qui se cari­ca­ture lui-même avec son oppo­si­tion entre hété­ro­no­mie et “auto­no­mie” (celle de la loi).

  3. Fr.
    8 mars 2009 à 15 h 46 min

    Content de vous retrou­ver en ligne, tou­jours aus­si justes et com­ba­tifs, plu­sieurs années après vous avoir ren­con­tré dans un des sémi­naires CRICS/C2SO à Lyon ! Au plai­sir de vous lire.

    • Avatar photo 9 mars 2009 à 22 h 00 min

      Contents aus­si de vous retrou­ver ! Vous n’êtes pas res­té inac­tif non plus à ce que je vois sur le web, à vous croi­ser ou vous entendre bientôt.

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