Interdire la mort … ou favoriser la vie ?
Ecrit par Jean-Paul Bourgès, 19 Jan 2016, 4 commentaires
Voulant stopper la dégringolade de son village de cinq-cent-trente-sept habitants, un maire du sud de la Calabre, Davide ZICCHINELLA, eut, il y a quelques mois, l’idée de prendre un arrêté interdisant que l’on meure sur le territoire de la commune.
Il pensait donner ainsi un signe susceptible de faire venir des jeunes. Il y a eu, en effet, un afflux significatif de nouveaux habitants, mais ce sont principalement des personnes âgées qui sont venues s’installer, en particulier à la maison de retraite … car ces vieillards, tenaillés par la hantise de la mort, s’imaginaient mieux abrités de la venue de Thanatos dans ce village où un arrêté municipal lui interdisait d’opérer. Clouer un fer à cheval à sept trous sur leur porte aurait probablement eu tout autant d’effet, sans quitter leur demeure antérieure.
On peut, tout d’abord s’incliner chapeau bas devant le charisme de cet édile dont une signature au bas d’un parchemin aurait le pouvoir de renvoyer la mort dans ses foyers. Nos meilleurs bonimenteurs me semblent très loin d’égaler Davide ZICCHINELLA. Il a, incontestablement du talent pour se faire connaître sans être passé par HEC puisqu’il est médecin.
Le deuxième enseignement est plutôt à destination des Instituts où l’on conduit des Etudes Politiques, comme rue Saint Guillaume à Paris. Quelle belle étude de cas sur la différence entre le message d’un Politique et ce que l’opinion comprend et retient.
La troisième leçon est également très politique, et c’est l’étonnement de voir recourir à une mesure négative incapable de changer le cours de la vie, au lieu de prendre uniquement des mesures positives susceptibles d’attirer des familles jeunes par des conditions d’installation, du travail, des facilités pour l’éducation des enfants … peut-être, d’ailleurs, en mobilisant les seniors auxquels cela donnerait une nouvelle raison de vivre, au lieu de ne surveiller que la progression de tous ces maux que l’âge nous apporte.
On peut rire et se moquer de la solution imaginée par ce maire, mais nos « grands Politiques » ne tablent-ils pas sur leur image pour nous faire croire qu’ils peuvent conjurer le mauvais sort ?
N’oublient-ils pas régulièrement de s’interroger sur l’énorme décalage entre ce qu’ils voulaient dire et ce que les Français en retiennent ?
Surtout ne prennent-ils pas plus volontiers des décisions répressives totalement inefficaces, comme on le voit après les attentats de 2015, au lieu de s’attaquer positivement au mal de vivre d’une population jeune laissée sans espoir et donc facile à entraîner dans les pires aventures ?
Jean-Paul BOURGЀS 19 janvier 2015
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Plaisanter, surplaisanter autour d’une plaisanterie… Pourquoi pas… Mais se lancer à en tirer des “enseignements” … C’est un peu écrire pour pas grand-chose…
En fait le maire de Sellia en Calabre a pris un arrêté humoristique relevant de la communication publique (celle que l’on rattache parfois à la “pédagogie”) pour inciter ses concitoyens âgés à faire un check-up annuel. Pour cela, l’arrêté les menaçait d’une pénalité fiscale de 30 euros en cas de décès alors qu’on n’avait pas été assidu aux démarches de prévention médicale… Ce maire était aussi médecin et avait à “lancer” un centre de gériâtrie, dont il voulait faire un outil de “développement local”. Apparemment ça a marché… Il y a des pratiques de la médecine qui peuvent être rentables, dans divers sens du terme…
Y a‑t-il là une grande innovation sociale à méditer…
Juste peut-être noter que les personnes âgées n’ont pas besoin qu’on censure l’idée de mort mais qu’au contraire il ne leur déplait de lui faire de temps en temps un clin d’oeiL..
Cette initiative de communication publique visait aussi à modifier le regard sur la gestion des personnes âgées et le comportement des personnes âgées par rapport à leur santé et leur mode de vie… Apparemment beaucoup d’entre elles peuvent vivre dans un village agréable, au lieu d’être concentrées en résidence spécialisée close, si bien sûr le village, par ailleurs, offre les services de santé nécessaire.
Il est probable que cette démarche était plus une démarche marketing pour faire bénéficier une bourgade cossue d’une population fiscalement rentable qu’une démarche sociale … comme celle par exemple qui vanterait avec le même genre d’argument un équipement gératrique de haut-niveau destiné, sans discrimination, aux habitants de Seine-Saint-Denis ou de Marseille…
Olivier, bien sûr que c’était une démarche marketing. Ceci étant elle a surtout attiré des vieux et non des jeunes … et de ce point de vue elle ressemble beaucoup à ce que font nos Politiques … c’est ce que j’ai voulu indiquer.
Pas de pensée, des slogans.
Oui, Larbi, et ce qui me frappe c’est le parallélisme troublant que je trouve entre le maire d’un village calabrais et les prétentieux qui dirigent l’une des principales économies mondiales. Ils sont exactement sur le même registre nullissime !