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Crise du savoir et haine de la jeunesse : l’inquiétante démographie française
3 février 2009 Réflexions et actions
Je suis professeur des universités en Sciences de l'information et de la communication.

Je travaille sur les relations entre nature, savoirs et sociétés, sur la patrimonialisation de l'environnement, sur les discours à propos de sciences, ainsi que sur la communication dans les institutions du savoir et de la culture. Au plan théorique, je me situe à l'articulation du champ de l'ethnologie et de la sémiotique des discours.

Sinon, dans la "vraie vie", je fais aussi plein d'autres choses tout à fait contre productives et pas scientifiques du tout... mais ça, c'est pour la vraie vie !
Igor Babou
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Un même mou­ve­ment de réformes réac­tion­naires frappe l’ensemble des champs du savoir, de leur pro­duc­tion à leur trans­mis­sion, de l’Ecole à l’université. Ces réformes s’installent avec auto­ri­ta­risme et convergent dans la direc­tion d’une bureau­cra­ti­sa­tion des métiers du savoir, et de leur assu­jet­tis­se­ment aux pou­voirs éco­no­miques et politiques.

Ce mou­ve­ment régres­sif, du point de vue des plus élé­men­taires liber­tés démo­cra­tiques et d’une concep­tion huma­niste du savoir, s’installe dans la bru­ta­li­té. Il néces­site une ana­lyse glo­bale. Il ne s’agit en effet pas seule­ment de réformes réac­tion­naires, mais sans doute d’un chan­ge­ment socio­lo­gique impor­tant qu’on ne com­pren­drait qu’imparfaitement si on n’y voyait que la trace des idéo­lo­gies étroites de l’actuel gou­ver­ne­ment : il y a sans doute plus en jeu.

L’une des clés de lec­ture — non exclu­sive et cer­tai­ne­ment insuf­fi­sante — peut être trou­vée dans le chan­ge­ment de la démo­gra­phie fran­çaise. Je me conten­te­rai ici de signa­ler cette piste. Je ne vais pas faire dans la sub­ti­li­té uni­ver­si­taire : il n’y a rien de très sub­til à ana­ly­ser, et nous sommes confron­tés à une telle bru­ta­li­té et à des enjeux suf­fi­sam­ment vitaux pour qu’on laisse la rhé­to­rique molle de l’universitaire au pla­card, du moins pour cette fois.

En 1946, la part des 18–24 ans et celle des 65 ans et plus dans la popu­la­tion étaient à peu près équi­va­lentes (res­pec­ti­ve­ment 12,9 % et 12,5 %). En 2007, la part des seniors est presque deux fois plus impor­tante que celle des jeunes (res­pec­ti­ve­ment 18 % et 9,8 %). En chiffres abso­lus, les 65 ans et plus ont dépas­sé les 10 mil­lions. [[Mariette Sineau, Effets de genre, effets de géné­ra­tion ? Le vote hommes/femmes à l’élection pré­si­den­tielle 2007, Revue fran­çaise de science poli­tique, Vol 57, n° 3–4, juin-août 2007, p. 353–369.]]

Le retour aux “fon­da­men­taux” auto­ri­ta­ristes de l’avant 68 s’explique fina­le­ment assez bien quand on fait un lien entre le vieillis­se­ment de la popu­la­tion fran­çaise et la droi­ti­sa­tion de son opi­nion publique : Sar­ko­zy n’a pas été élu par la jeu­nesse et ne repré­sente aucu­ne­ment — les sta­tis­tiques et diverses études le prouvent — un élan de la jeu­nesse vers un ave­nir radieux. Non, comme cer­tains démo­graphes et poli­to­logues l’ont mon­tré, le vieillis­se­ment de la popu­la­tion fran­çaise (et plus géné­ra­le­ment celui de la popu­la­tion des régions indus­tria­li­sées de l’hémisphère nord : Europe, Cana­da, USA) porte le plus sou­vent des valeurs réac­tion­naires, xéno­phobes, et éga­le­ment hos­tiles au savoir. D’autres études sont dis­po­nibles, qui montrent de plus une cer­taine détes­ta­tion des jeunes. Ain­si, selon une enquête de l’IN­SEE por­tant sur la Per­cep­tion et le vécu des com­por­te­ments into­lé­rants (enquête “His­toire de vie”) [[http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/es393-394h.pdf ]] :

Les jeunes déclarent plus que le reste de la popu­la­tion avoir subi des atti­tudes néga­tives au cours de leur vie

La diver­si­té des motifs évo­qués par les per­sonnes  inter­ro­gées ren­voie direc­te­ment à leur propre diver­si­té et leurs carac­té­ris­tiques spé­ci­fi ques. Bien évi­dem­ment, les per­sonnes immi­grées ou d’origine immi­grée ont davan­tage  énon­cé des com­por­te­ments néga­tifs concer­nant leurs ori­gines et les per­sonnes han­di­ca­pées des  atti­tudes ren­voyant à leur han­di­cap ou leur état de san­té. De plus, cer­taines situa­tions peuvent  expo­ser davan­tage que d’autres aux com­por­te­ments  into­lé­rants, comme le fait d’avoir vécu  dans une cité et plus géné­ra­le­ment de vivre dans  une grande ville, par oppo­si­tion à ceux vivant  en milieu rural. Le fait le plus saillant est cepen­dant la régu­lière  et forte décrois­sance de la pro­por­tion de faits  énon­cés avec l’âge : de 49 % des per­sonnes  âgées de 18 à 24 ans à 13 % de celles ayant plus  de 70 ans.

Les aspects sta­tis­tiques de la démo­gra­phie coïn­cident donc avec le vécu quo­ti­dien, le res­sen­ti, des atti­tudes néga­tives : plus on est jeune, plus on se sent vic­time d’in­to­lé­rance, et plus on est âgé, plus on se sent à l’a­bri des juge­ments néga­tifs. Et sans doute plus on en énonce…

De toute manière, qui ne sent pas, dans son envi­ron­ne­ment de tra­vail ou de loi­sirs, cette haine mon­tante pour la jeu­nesse por­tée par la France Sar­ko­zyste ? Qui ne sent pas cette haine du savoir qui gagne tous les milieux sociaux ?

Pour se convaincre du lien entre vieillis­se­ment de la popu­la­tion, faible capi­tal cultu­rel et auto­ri­ta­risme (et pas seule­ment per­ce­voir cela intui­ti­ve­ment, mais pour pou­voir l’argumenter un tant soi peu ration­nel­le­ment, ce qui est autre chose…), et même s’il fau­drait appro­fon­dir et étayer ce type d’analyse, cha­cun peut lire l’article de Mariette Sineau (direc­trice de recherche au CNRS/CEVIPOF) dans la Revue fran­çaise de science poli­tique (Vol 57, n° 3–4, juin-août 2007, p. 353–369). L’article s’intitule “Effets de genre, effets de géné­ra­tion ? Le vote hommes/femmes à l’élection pré­si­den­tielle 2007”.

Les quelques extraits de cet article, que je cite plus bas pour faci­li­ter la lec­ture de ce texte, plus quelques don­nées grap­pillées ici ou là dans diverses études (voir par exemple le site de l’INSEE), plus ce qu’un cer­tain nombre d’entre nous sentent confu­sé­ment (ou clai­re­ment…), nous dressent un por­trait gla­çant de la France de 2008 : une France égoïste et détes­tant sa jeu­nesse, une France refu­sant de trans­mettre son héri­tage à ceux qui, d’une manière ou d’une autre, seront son ave­nir. Une France du pas­sé, réac­tion­naire, et sur­tout fort peu dotée cultu­rel­le­ment et sous diplô­mée. C’est cette France qui n’a réus­si ni à l’école, ni dans son appré­hen­sion de la culture, qui donne aujourd’hui la direc­tion à suivre aux ins­ti­tu­tions du savoir et de la culture, avec les dégâts que l’on sait. Cette France, c’est celle qui pense que l’homosexualité et le sui­cide sont “géné­tiques” : une France inculte, bête à bouf­fer du foin, vul­gaire, un conden­sé de bar­ba­rie en deve­nir. Qui ne sent pas confu­sé­ment le lien qui existe entre l’ambiance de la France de 2008 et l’ambiance de la France des années 38 à 40 ?

Bref : la France de 2008 se construit une Ecole d’avant guerre en tablant sur un modèle édu­ca­tif du pas­sé por­té par une idéo­lo­gie régres­sive, pater­na­liste et auto­ri­taire. Une France qui n’aime pas le savoir, et qui est main­te­nant prête à retom­ber dans la barbarie…

La déso­béis­sance civile sera le seul moyen de sor­tir par le haut de l’impasse dans laquelle nos anciens nous ont four­voyés. Ce n’est pas à gauche que nous trou­ve­rons le moindre sou­tien : la gauche fran­çaise est morte, entiè­re­ment livrée au mar­ke­ting poli­tique, au cynisme et au rela­ti­visme. Mais c’est dans les refus quo­ti­diens que cha­cun peut faire que l’on pour­ra inver­ser ce mou­ve­ment délé­tère et rebâ­tir en com­mun des prin­cipes et une éthique huma­niste, hors des par­tis politiques.

Appe­lons aus­si nos anciens, du moins ceux qui ont voté Sar­ko­zy, à prendre leurs res­pon­sa­bi­li­tés, et à ne pas oublier qu’ils dis­pa­raî­tront un jour et qu’il y a une jeu­nesse dans ce pays qui doit avoir un ave­nir : vieillir plus long­temps et dans de meilleures condi­tions n’est pas une rai­son suf­fi­sante pour sacri­fier l’avenir d’une nation au pro­fit d’un hédo­nisme égo­cen­trique. Rap­pe­lons-leur, par exemple, que ce que l’UMP détruit aujourd’hui c’est ce qui leur a per­mis, en géné­ral, de vivre mieux et plus long­temps que leurs propres parents : le ser­vice public.

Et espé­rons qu’il ne soit déjà trop tard pour lut­ter contre le retour de la bête…

Remarque : bien enten­du, mes pro­pos ne signi­fient abso­lu­ment pas que tout indi­vi­du de plus de 65 ans serait raciste et illet­tré. Il ne s’agit ici (en tout cas dans l’article cité qui va suivre, que de signi­fi­ca­tion STATISTIQUE).

Voi­ci les extraits promis :

Cita­tion (de Mariette Sineau) :

En 1946, la part des 18–24 ans et celle des 65 ans et plus dans la popu­la­tion étaient à peu près équi­va­lentes (res­pec­ti­ve­ment 12,9 % et 12,5 %). En 2007, la part des seniors est presque deux fois plus impor­tante que celle des jeunes (res­pec­ti­ve­ment 18 % et 9,8 %). En chiffres abso­lus, les 65 ans et plus ont dépas­sé les 10 millions.

Cita­tion (de Mariette Sineau) :

En tant que favo­ri des femmes âgées, le can­di­dat de l’UMP dis­pose d’une base élec­to­rale au pro­fil très typé, qui pré­sente des carac­tères anti­no­miques avec celle de Ségo­lène Royal. Il est ain­si le lea­der pré­fé­ré des femmes mariées (37 %) et plus encore des veuves (40 %), arri­vant loin devant les trois autres can­di­dats. Il trouve aus­si un meilleur écho par­mi les élec­trices pauvres en dot sco­laire, consé­quence logique de ce que, chez les seniors, les femmes sont défi­ci­taires en diplôme. Nico­las Sar­ko­zy concentre ain­si sur son nom plus du tiers des voix des femmes qui n’ont, au mieux, pour titre sco­laire que le seul cer­ti­fi­cat d’études pri­maires (+ 11 points par rap­port aux hommes), contre seule­ment 24 % pour Ségo­lène Royal, 15 % pour Fran­çois Bay­rou et 10 % chez Jean-Marie Le Pen. La prise en compte de l’articulation entre le genre et la pro­fes­sion de la per­sonne inter­ro­gée, l’appréhension de son sta­tut ou encore de sa vul­né­ra­bi­li­té face au chô­mage per­mettent de poin­ter d’autres « dif­fé­rends » élec­to­raux (tableau 3). Quand on décrit la base socio­lo­gique du can­di­dat de l’UMP, il vaut d’abord de sou­li­gner que Nico­las Sar­ko­zy est le can­di­dat « natu­rel » des femmes inac­tives, qu’elles soient femmes au foyer ou retrai­tées. Ain­si, 38 % des pre­mières ont l’intention de voter pour lui comme 39 % des secondes (+ 5 points par rap­port aux hommes), alors que Ségo­lène Royal ne pola­rise que 28 % d’audience auprès des femmes au foyer et 23 % auprès des retraitées.

Cita­tion (de Mariette Sineau) :

Si on s’attache, main­te­nant, à dres­ser le por­trait idéo­lo­gique et cultu­rel des élec­to­rats (tableau 5), on observe que le genre est por­teur de diver­gences signi­fi­ca­tives, en lien plus ou moins direct avec les cli­vages socio­lo­giques et poli­tiques pré­cé­dem­ment énon­cés. Ain­si, Nico­las Sar­ko­zy, parce qu’il est sou­te­nu par les femmes âgées et même très âgées, attire tout natu­rel­le­ment les géné­ra­tions socia­li­sées par les normes catho­liques les plus strictes : plus de la moi­tié des pra­ti­quantes lui accordent leur suf­frage (+ 10 points par rap­port aux hommes). D’ailleurs, 39 % des catho­liques non pra­ti­quantes le sou­tiennent aus­si, contre 17 % seule­ment des élec­trices se décla­rant sans reli­gion (qui, elles, ral­lient Ségo­lène Royal à près d’un tiers). Paral­lè­le­ment, le can­di­dat de l’UMP exerce sa force d’attraction chez les femmes dont les valeurs les rat­tachent à un uni­vers de droite, voire d’extrême droite, tant en matière de fémi­nisme que de libé­ra­lisme cultu­rel et éco­no­mique, d’autoritarisme et d’ouverture aux autres. Ain­si, le porte-dra­peau de l’UMP ras­semble les voix de 45 % des élec­trices qui désap­prouvent l’idée que « les choses iraient mieux en France si les femmes étaient plus nom­breuses au Par­le­ment » (+ 11 points par rap­port aux hommes), comme 39 % de celles qui sont en désac­cord avec l’idée que « les couples homo­sexuels devraient avoir le droit d’adopter des enfants » (+ 7 points). Expriment aus­si un net pen­chant pour Nico­las Sar­ko­zy (39 %) toutes celles qui, ayant une vision pas­séiste du rôle des femmes, les enferment dans leur rôle de pro­créa­trices (39 %). De même, ce can­di­dat fait une très bonne audience, de l’ordre de 40 % ou davan­tage, chez celles qui, libé­rales au plan éco­no­mique, pensent que « les chô­meurs pour­raient trou­ver du tra­vail s’ils le vou­laient vrai­ment », ou adhèrent à l’idée qu’il faut don­ner « la prio­ri­té à la com­pé­ti­ti­vi­té de l’économie fran­çaise sur l’amélioration de la situa­tion des sala­riés ». Enfin, Nico­las Sar­ko­zy fait aus­si ses meilleurs scores chez les élec­trices mar­quées du sceau de l’autoritarisme, qui sou­hai­te­raient le réta­blis­se­ment de la peine de mort (39 % de vote en sa faveur), chez celles que taraude la pré­oc­cu­pa­tion de l’immigration (40 %), l’augmentation de la délin­quance (34 %), ou encore chez celles, empruntes de fri­lo­si­té, qui vou­draient que « la France se pro­tège davan­tage du monde d’aujourd’hui » (36 %).

Cita­tion (de Mariette Sineau) :

En terme d’adhésion à l’univers des valeurs, on note­ra une inver­sion constante selon le genre au sein des deux élec­to­rats lepe­niste et sar­ko­zien : dans celui de Jean-Marie Le Pen, ce sont les hommes qui se donnent à voir comme les plus droi­tiers sur toutes les dimen­sions évo­quées, alors que dans l’électorat de Nico­las Sar­ko­zy, ce sont les femmes qui adhèrent le plus volon­tiers aux valeurs de la droite la plus conser­va­trice, sinon la plus tra­di­tio­na­liste. Ce résul­tat ren­voie là encore à la struc­ture par âge et par genre des deux clien­tèles élec­to­rales : alors que le can­di­dat de l’extrême droite est délais­sé par les « anciennes », le can­di­dat de l’UMP fait flo­rès chez elles. Si on ana­lyse le suc­cès de Nico­las Sar­ko­zy comme la vic­toire du can­di­dat qui s’est récla­mé « sans com­plexe » des valeurs de droite, alors on peut dire que sa stra­té­gie a tou­ché les femmes au cœur. Dans le même temps, il a su aus­si incar­ner, auprès d’elles, le retour du poli­tique et de la confiance dans cette élec­tion reine de la Cin­quième Répu­blique. Plus de 40 % des élec­trices sar­ko­ziennes croient que « les résul­tats de la pré­si­den­tielle per­met­tront d’améliorer les choses en France » (+ 4 points par rap­port aux hommes), contre un peu plus du quart des élec­teurs de Ségo­lène Royal, qu’ils soient hommes ou femmes. Last but not least, ce sont près des trois quarts des élec­trices de Nico­las Sar­ko­zy qui se disent confiantes dans la droite pour gou­ver­ner (+ 7 points par rap­port aux hommes). Dans le camp d’en face, les élec­teurs et les élec­trices de Ségo­lène Royal ne sont que deux tiers à faire confiance à leur propre camp, la gauche, pour gou­ver­ner. Le vote d’adhésion que Nico­las Sar­ko­zy a su déclen­cher, en incar­nant, pour l’instant, une sorte d’idéal de l’action poli­tique, a trou­vé un écho encore plus grand, on le voit, auprès des électrices.

Cita­tion (de Mariette Sineau) :

Les don­nées de l’enquête pré-élec­to­rale PEF 2007 mettent au jour un effet genre et un effet géné­ra­tion qui se ren­forcent et se cumulent l’un l’autre dans les urnes. Plus on vieillit, plus on vote à droite ; plus on appar­tient à des géné­ra­tions âgées (qui n’ont pas été socia­li­sées aux valeurs soixante-hui­tardes et post-maté­ria­listes), plus fortes sont les pro­ba­bi­li­tés que l’on adhère à des valeurs tra­di­tion­nelles, aux anti­podes de la moder­ni­té, du fémi­nisme et de l’ouverture aux autres. Ce constat a pesé à l’évidence de façon déci­sive sur l’issue finale du scru­tin. On a vou­lu faire de Nico­las Sar­ko­zy le sym­bole de l’arrivée aux affaires d’une nou­velle géné­ra­tion tour­née vers la France du 21e siècle. Le fait est indé­niable, mais on peut remar­quer paral­lè­le­ment que, dans un élec­to­rat vieillis­sant – au sein duquel le poids numé­rique des seniors est double de celui des juniors –, le pré­ten­dant de l’UMP n’est pas le can­di­dat des jeunes, qui sont l’avenir de la socié­té et de l’économie, mais bien plu­tôt le lea­der pré­fé­ré des vieux et sur­tout, comme nous avons ten­té de le mon­trer, des vieilles femmes [19]. Bien qu’il ait fait cam­pagne en réha­bi­li­tant la valeur tra­vail, Nico­las Sar­ko­zy doit son suc­cès aux élec­teurs et sur­tout aux élec­trices qui sont, depuis long­temps, retiré(e)s du mar­ché du tra­vail. Or, les ren­tiers et ren­tières, aux­quelles s’ajoutent les femmes au foyer, ne repré­sentent pas la frac­tion du corps élec­to­ral la plus emblé­ma­tique du désir de renou­veau et de chan­ge­ment social. Cer­tains font le pari que, dans quelques années, quand les baby boo­mers seront par­ve­nus mas­si­ve­ment à l’âge de la retraite, alors la gauche pour­ra être por­tée au pou­voir par la conjonc­tion entre le vote des jeunes et celui des per­sonnes âgées (des deux sexes), qui, alors, conti­nue­ront à sou­te­nir les idées de gauche des géné­ra­tions ayant vécu Mai 68 et le fémi­nisme. Le vieillis­se­ment ne sera plus, pour les ana­lystes, syno­nyme de conser­va­tisme [20]. L’appartenance aux géné­ra­tions âgées – qui, à l’avenir, seront beau­coup plus titrées sco­lai­re­ment – n’ira pas for­cé­ment de pair avec l’adhésion à un sys­tème de valeurs traditionnel.

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"1" Comment
  1. Pour sou­li­gner l’ac­tua­li­té du pro­pos sur les posi­tions anti-jeunes de l’exe­cu­tif Fran­çais, je vous ren­voie à trois exemples récents où des jeunes (col­lé­giens notam­ment) ont été direc­te­ment agres­sés alors qu’ils n’ont com­mis abso­lu­ment aucun tort :

    - en novembre der­nier, les gen­darmes débarquent dans un col­lège du Gers pour des fouilles au corps :
    http://www.rue89.com/2008/12/01/drogues-faut-il-envoyer-la-police-dans-les-colleges

    - le 5 mars 2009, gare Mont­par­nasse, des col­lé­giens frap­pés par des CRS. On en voit un petit bout sur une vidéo :
    http://www.sudouest.com/accueil/actualite/france/article/522673/mil/4256379.html

    - dans la nuit du 7 au 8 mars, une soi­rée-ren­contre à Tours orga­ni­sée à par­tir de Face­book reçoit une charge de CRS :
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/03/09/une-soiree-organisee-sur-facebook-degenere_1165270_3224.html

    Je me demande s’il fait bon être jeune dans ce pays par les temps qui courent. On est pas loin d’être sus­pect juste parce qu’on est jeune. C’est encore une manière de divi­ser pour régner.

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